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25.03.2022

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par Equipe OIEF

Pour les intérêts économiques de la France, notre classement des cabinets de conseil

Deux faits d’actualité nous poussent aujourd’hui à publier la première édition de notre Top 25 des cabinets de conseil en France. La première, la guerre en Ukraine, relève du drame. La seconde, après les  révélations de l’ouvrage Les Infiltrés et du rapport sénatorial « Un phénomène tentaculaire : l’influence croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques », relève du scandale.

Le drame ukrainien nous fait prendre conscience avec une acuité nouvelle que sans souveraineté des États, les libertés publiques ne peuvent être garanties. Il nous contraint, nous Européens, à prendre plus que jamais en compte la question de nos dépendances : énergétiques, certes, mais aussi diplomatiques et économiques.

Le scandale du recours massif de l’État à des cabinets de conseil étrangers – essentiellement anglo-saxons, qui pour certains ne paient pas ou peu d’impôts en France – met au jour plusieurs enjeux.

Celui d’une forme de concurrence déloyale : les cabinets installés en France ne luttent pas à armes égales avec leurs concurrents anglo-saxons aux charges fiscales plus avantageuses.

Celui de la soumission de la France à des pensées managériales élaborées aux États-Unis, à partir de contextes américains et d’une culture sociale américaine qui induit une valorisation des chercheurs et intellectuels liés aux universités américaines, au détriment des universités françaises. Par là, nous assistons à l’affaiblissement de la recherche française en sciences de gestion et économie, qui trouve difficilement des débouchés locaux. Cet affaiblissement global intellectuel, très lié à la notion de soft power, est peut-être le plus regrettable.

Celui de la perte de la confidentialité des données, puisque pour fonctionner un cabinet de conseil doit récupérer de nombreuses informations stratégiques sur la situation d’une entreprise, tout ceci risquant d’être partagé avec des entités étrangères et stocké aux États-Unis – donc ouvert à des entités étatiques américaines.

Celui, enfin, d’une culture du conseil qui implante un modèle « néo-fordiste » dans nos sociétés du savoir, avec des « penseurs » des stratégies et organisations décorrélés des acteurs et faiseurs, ce qui 1/ empêche en réalité d’élaborer des stratégies qui tiennent réellement la route (trop coupées du « réel ») et 2/ détruit complètement les capacités des organisations à gérer elles-mêmes leurs changements. In fine, le recours à ces cabinets risque donc d’être contre-productif, en orientant mal les décisions et en fragilisant le potentiel des organisations.

La commission d’enquête sénatoriale a été la conséquence des alertes nombreuses lancées par l’observatoire depuis plusieurs mois. Les experts de l’OIEF ont contribué à cette prise de conscience, en proposant notamment de « maîtriser le recours par l’État à des prestataires de services étrangers » dès juin 2020. Ce nouveau classement vise désormais à accompagner les décisions des acteurs publics et privés en fonction des critères de souveraineté. Il sera publié chaque année.


La méthodologie de notre classement

Notre classement du Top 25 des cabinets de conseil se fonde donc sur des critères qui tiennent compte des capacités opérationnelles des cabinets (critère 1 : part des dirigeants français) ; leur capacité à protéger les données stratégiques de leurs clients dans un contexte de guerre économique (critère 2 : pays d’hébergement du site, évalués selon qu’il se trouve en Union européenne ou non) ; leur implication directe dans l’économie du pays (critère 3 : pays du siège social) ; leur contribution à l’économie du pays (critère 4 : ratio des employés en France par rapport au reste du monde).

Notre classement


Détails de l’étude

Le classement du Top 25 des cabinets de conseil est établi sur une base de quatre critères qui tiennent compte de l’aptitude desdits cabinets à accomplir les prestations demandées ainsi que de leur aptitude à préserver les intérêts souverains des entreprises ou institutions publiques faisant appel à leurs services.

Ces critères sont établis sur :

1.La part des dirigeants français (membres des comités exécutifs et/ou partners) des branches françaises des cabinets retenus (Critère 1).

2.La sensibilité des cabinets de conseil évalués aux enjeux de souveraineté des données, établie par l’hébergement de leur site Internet au sein de l’Union européenne, en France, ou dans des pays hors Union européenne (Critère 2).

3.La présence ou non d’un siège social en France (Critère 3).

4.L’investissement ds cabinets de conseil dans leurs capacités opérationnelles sur le territoire. Il est évalué par le ratio entre le nombre d’employés total des salariés employés par les cabinets de conseil évalués, et les salariés qui travaillent en France (Critère 4).

Ce classement a été réalisé sur la base d’un recueil des données opéré en mars 2022.

 

Critère 1 – La part des dirigeants français au sein des branches françaises des cabinets de conseil

Mode de calcul : Calcul du pourcentage du nombre de dirigeants français dans les comités exécutifs des cabinets (ou du nombre total de partners) au sein de leurs filiales françaises.

Notation : La note est établie de 0 à 10. Plus la part de dirigeants français au sein des comités exécutifs / nombre de total de partners est élevée, plus la note attribuée est élevée.

Sources : Sites Internet des cabinets de conseil.

Critère 2 – Les capacités des cabinets de conseil à protéger les données stratégiques des clients

Critère technique : Pays d’hébergement du site de la version française du cabinet de conseil.

Notation : Note établie de 0 à 10. La note de 10 est attribuée aux cabinets dont le site est hébergé en France ; la note de 5 aux cabinets dont le site est hébergé dans tout autre pays de l’Union européen et soumis au RGPD ; la note de 0 aux pays dont le site est hébergé dans un pays qui n’est pas soumis au RGPD.

Outil : Le WHOIS Geotool, sur la base de l’adresse IP d’hébergement du site.

Critère 3 – L’implication directe des cabinets de conseil dans l’économie du pays

Critère mesuré : Présence ou non d’un siège social en France.

Notation : Note établie de 0 à 10 en fonction de la présence d’un siège social en France. La note de 0 est attribuée en cas d’absence de siège social en France, la note de 10 en cas de présence de siège social.

Sources : Sites des sociétés ; societe.com

Critère 4 – La contribution des cabinets de conseil à l’économie du pays

Mode de calcul : calcul entre le ratio de l’ensemble des salariés des cabinets de conseil à l’échelle du monde et du nombre de salariés employés en France.

Notation : Note allant de 0 à 10 sur la base du ratio entre le nombre de salariés à l’échelle du monde et le nombre de personnes employées en France. Plus la proportion de salariés employés en France est élevée, plus la note attribuée est élevée.

Sources : pages LinkedIn des cabinets de conseil.

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par La rédaction